L’histoire de la géologie en quelques mots

Books Ngram Viewer est le nouveau service de Google permettant de suivre l’évolution de l’usage d’un mot au fil du temps. Essayons avec quelques mots de géologie de retracer l'évolution de leur utilisation.

Titre original : Geology Word Usage Using Google Ngram Viewer

Je n’ai pas eu toutes les réponses que j’attendais mais je me suis bien amusé avec Google Ngram Viewer, un outil qui permet de suivre l’évolution de l’usage d’un mot au fil du temps.

Google a utilisé environ 5 millions de livres (représentant un total de 500 milliards de mots) numérisés à partir de bibliothèques pour visualiser graphiquement les changements de vocabulaire. L’algorithme compare la fréquence d’un mot à travers ces 5 millions de livres avec l’ensemble des autres mots. On peut remonter jusqu’en 1500 mais les résultats sont plus fiables après 1800. Il est aussi possible de voir la liste des livres dans lesquels le mot apparaît.

On peut ainsi savoir quand un mot a été utilisé la première fois, comment sa popularité a évolué au fil du temps, et tenter de comprendre comment et pourquoi deux termes similaires ont évolué l’un par rapport à l’autre. Il peut s’agir de tendances culturelles, de modes ou de nouveaux développements scientifiques, techniques etc.

L’outil n’offre aucune explication quant au destin de tel ou tel mot. J’ai tenté mon coup avec quelques termes de géologie.

Aqueous rock (= roche aqueuse) depuis 1800 (en bleu sur la figure) :

L’adjectif “aqueux” pour décrire une roche ou un sédiment formé dans l’eau était populaire au XIXe siècle mais, au fur et à mesure que les connaissances progressaient, il a lentement laissé sa place à des termes plus spécifiques pour décrire les conditions dans lesquelles les sédiments se déposent.

Peneplain (= pénéplaine), qui décrit une surface de bas relief créée par érosion prolongée, depuis 1900 (en bleu) :

J’ai ajouté les mots landform (= modelé, en jaune) et geomorphology (= géomorphologie, en violet) pour voir si le déclin entamé dans les années 1940 pouvait être dû à une baisse de l’intérêt pour l’étude des formes du paysage. On voit bien, au contraire, que landform et geomorphology ont connu une forte croissance après cette date. De même, les termes erosional surface (= surface d’érosion, en vert) et planation surface (= surface d’aplanissement, en rouge) ont connu une hausse minime mais significative de leur fréquence. Je pense qu’en quelque sorte, l’utilisation du terme surface — isolément ou adjoint à un mot décrivant un processus de formation, soit terrestre soit marin — est devenu la norme. Décrivant plutôt le processus de formation, le terme peneplain est probablement passé de mode pour décrire des paysages érodés de bas relief.

Quid de la dénomination des départements de recherche en géologie ? Regardons à partir de 1900 :

On peut voir que l’expression Department of Geology (en bleu) est la plus courante. Son usage était en augmentation constante pendant le XXe siècle, avec un repli au milieu des années 1960 et un pic dans les années 1980, puis un déclin… traduisant le faible nombre de nouveaux départements de géologie ?

Il existe pourtant d’autres façons de nommer les départements de recherche en géologie. Les expressions Geology and …, Earth Sciences et Earth Sciences and … se sont banalisés au début des années 1960. La croissance de Geology and … pourrait traduire l’institutionnalisation de spécialités de la géologie comme la géophysique et la géochimie. Les départements de recherche accueillirent de multiples spécialités et furent renommés en conséquence.

En ce qui concerne l’expression Earth Sciences…, comparons l’usage de ces deux termes : interdisciplinary (= interdisciplinarité, en bleu) et holistic (= holistique, en rouge) :

Leur usage a augmenté au début des années 1960, signe d’une plus grande collaboration entre différents champs, une conscience accrue de l’importance de comprendre l’interaction de la géosphère avec la biosphère et l’atmosphère, une tendance à passer à l’échelle supérieure… d’où un plus grand nombre de départements de recherche reflétant la nature interdisciplinaire de leur quête.

Enfin, on peut s’intéresser à l’influence des développements technologiques avec les termes maps (= cartes, en bleu) et mapping (= cartographie, en rouge), à partir de 1900 :

Ils se sont tous les deux répandus au cours du siècle dernier, ce qui reflète l’exploration et l’étude croissante des divers aspects de la Terre. Le terme mapping, pourtant, a vraiment décollé dans les années 1970.

Deux développements technologiques y ont sans doute participé. En 1972, le programme de télédétection par satellite Landsat est devenu opérationnel et a fourni des images de la Terre à usage du grand public, rendant plus facile la cartographie de sa surface. L’imagerie satellite est couramment utilisée aujourd’hui pour la cartographie.

Et au milieu des années 1980 les outils de cartographie assistée par ordinateurs — comme les systèmes d’information géographique (SIG), se sont répandus, ouvrant l’accès aux données géographiques et à de nouveaux moyens de compiler des cartes.

Alors, qu’attendez-vous pour chercher votre terme de géologie préféré et analyser ses hauts et ses bas ?

>> Article initialement publié sur Rapid Uplift et traduit depuis l’anglais par Antoine Blanchard

>> Illustration FlickR CC : Molas

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